Archives pour la catégorie Tronches, bouilles, faces, portraits…

Michel Houellebecq, l’oscillation de la souffrance à l’ennui…

Michel Houellebecq soluto huile peintureHuile sur panneau, 40 cm x 40 cm, 2014

J’ai voulu peindre Michel Houellebecq dans une gamme de gris colorés, ni trop chauds, ni trop froids, oscillant du violet minéral au vert sourd. J’ai chassé le blanc de titane de ma palette et abaissé par le jaune de Naples toutes les lumières franches afin qu’elles ne soient pas trop crues.
Le gris est la couleur de la désillusion, de la nuance. Ses inflexions, tantôt roses, tantôt mauves, tantôt bleus, chantent les regrets, la nostalgie, l’ennui, l’ironie parfois. Sans lui l’éclat n’existe pas, il n’est que bruit, fracas, éblouissement et il manque d’assise.
Je désirais rester dans la gamme des sentiments mélancoliques que les poèmes et les romans de ce grand auteur contemporain m’inspirent.

Tutu…

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Les voies délicieuses du salut et de la perdition (5)…

Mon Apéro

 

On peut donner des leçons d’ morale
Quand on possède bonne soupe et bon feu
Mais quand on ne possède que peau d’ balle
On prend son plaisir où on peut
Dans le quartier, on me blague
Je suis un pilier d’ bistrot
C’est vrai qu’avec les pochards, j’ divague
Chaque fois qu’ j’ai le cœur trop gros
D’autres cherchent des trucs compliqués
Mais comme j’ai horreur du chiqué
Moi, c’est au bord du comptoir
Que je prends tous les soirs
Mon apéro… J’ discute avec le patron
J’ l’appelle par son p’tit nom
Oh, c’est un bon gros
Comme les mâles j’ lui dis : Arthur, vas-y !
Et j’ te lui joue la tournée au zanzi
Le phono pousse une java
L’ennui doucement s’en va
Tout me semble beau
Et j’ noie mon ennui profond
Pour une heure, tout au fond
D’un apéro… Sur mes seize ans, comme j’étais belle gosse
Tous les gars m’ faisaient du boniment
Alors, je m’ suis mise à faire la noce
C’est venu, je n’ sais pas comment
Y m’ payaient tout sans rien dire
J’avais voiture et hôtel
Mais il me fallait toujours sourire
Le cœur barbouillé de fiel
Et j’ rêvais d’un petit mécano
Qui n’ m’offrirait que des bécots Alors, pour chasser le noir
J’ buvais dans tous les bars
Des apéros
Grimpée sur un tabouret
Trempait dans mon gobelet
Un chalumeau
Et devant l’air fatigué des danseurs
Je m’ sentais prise par les chasses du chauffeur
Plus que moi riche d’amour
Il embrassait chaque jour
Une dactylo
Et j’ n’avais pour m’ consoler
Mon cœur si désolé
Qu’ les apéros Mais les cocktails me tournaient la tête
Alors j’ai bientôt plaqué l’ métier
Me r’voilà, bon Dieu que la vie est bête !
Revenue dans mon vieux quartier
La r’voilà, ma p’tite église
Et chez moi rien n’a changé, rien !
Rien sinon mon cœur, cette prison grise
À qui tout reste étranger
Hélas, le bonheur n’a qu’un temps
Voyant que l’amour foutait l’ camp
Je suis rev’nue au comptoir
Où l’on m’ payait le soir
Des apéros… Je n’ crois plus à rien du tout
« Patron, encore un coup
Et du costaud ! »
C’est en baissant l’ nez que j’ revois les cieux
Et dans mon verre, je pêche des rêves bleus
Affamée par les coups durs
J’ai pas mis la main sur
Le bon numéro
Et mon cœur vide d’amour
N’a plus d’ tendresse que pour
Les apéros…

 

Robert Malleron