
«Ce serait un moindre mal de mourir si l’on pouvait tenir pour assuré qu’on a du moins vécu.»
[Clément Rosset] – Le Réel et son double
Des fois j’en cause avec mon gars, qui me regarde alors avec des yeux ronds… Pour lui, pas de problème, la réalité du monde, il en est la preuve vivante… Moi, je suis plus dubitatif… Qu’on vienne me prouver que j’existe ! Que tout ce qui parait être n’est pas que la mise en scène d’un faux cerveau déréglé qui s’invente en continu (Et c’est pas René Desbrèmes qui pourrait oser me dire le contraire ! Il serait culotté ! Parce que sa soluce, à lui, son dieu organisateur qui vient boucher le grand trou vacant et sa preuve ontologique à deux balles, elle me parait un tantinet artificielle, si j’peux m’permettre !…)… Parfois, quand elle fait ses comptes-rendus, j’enquiquine Moly avec mes interrogations rigolardes (car tout ça ne me rend pas triste… Au contraire !… Manquerait plus que ça, de n’être pas et de se prendre au sérieux…) Elle essaie alors de me faire taire en sous-entendant que je me fais du mal (tu parles…) Mais j’insiste en espérant la troubler un peu (je ne prends pas de gros risques, elle est du lot des bienheureux qui ne doutent de rien et qui se déplacent dans un monde de certitudes…) Je suis comme ça…
Taquin et content de moi…
Pourquoi me lancé-je sur mon grand sujet secret et vous en entretiens-je ? Parce que c’est la fin de l’année, que ça me travaille la substance en délicatesse et que j’aime bien, en guise de cadeaux, partager mes questions…
Et en plus, pas vache, comme le sujet de mon post est épineux, vous êtes dispensés du ménage et des commentaires (laissez seulement les clés dans la boite en partant et venez me claquer un bécot sur facebook… ça suffira comme ça)!
Sympatoche la viocque! Finalement elle arrive encore à se faire rincer. Si tu l’écoutes trop longtemps, un coup tu ris, un coup tu pleures, mais tu finis toujours par lui payer son Cointreau, sa Chartreuse! Maintenant, bien sûr, elle pleure sur l’époque, conspue la lopette et chante sa misère tout en trémolos, mais dans ses belles années, quand elle avait encore la whisky voice, qu’elle faisait l’appoint en renseignant les condés de la Mondaine et qu’elle s’asseyait langoureusement au bar du Ruban Bleu, ses châsses humides accueillant les éclats des cristaux, sa main gantée posée sur son roulis de hanche, sa longue jupe moirée rouge remplie comme il faut et fendue sur la soie noire d’une cuisse galbée et dessinée par Gruau, quelle essoreuse de morlingue c’était!