Et maintenant?…


 

 

« Oh, ben maintenant, qu’il me dit comme ça en me tournant le dos, y a plus qu’à attendre… Et reste pas là dans mes pattes avec ton carnet, ta gomme et tes crayons! Tu mets du désordre dans les secondes qui passent… Nan, même là c’est encore trop près… Recule et prend des leçons…

Moi, mon petit savoir-faire, il n’est pas de capturer des bonhommes sur des morceaux de papier! Il est dans l’art d’être au monde en en faisant le moins possible…

Recule que je te dis!  Tu empêches l’air de circuler dans les feuilles. Avec ton blabla incessant tu fais des rides sur l’eau du bassin. Même le bruit du pas des femmes sur le gravier crissant tu trouves le moyen de le corrompre!… Respire moins fort ! Arrête de mettre ton carnet de croquis entre toi et le monde… Il t’a reconnu, le monde ! En tout cas, il t’a fait une place.  C’est déjà beaucoup… Il se fiche bien de toi…»

Faire trois cents bornes pour entendre des bêtises comme ça ! Brûler du gas-oil et payer des parkings en plein Paris pour que monsieur me la joue grand sage ! Merci bien ! Je le lui ai dit ! Je le lui ai même chanté ! « Ton panthéisme est décousu ! Si ça continue on verra le trou de ton… Panthéisme est décousu ! »

Il m’a regardé drôlement. Il avait l’air consterné.

J’étais bien vengé !



3 réflexions au sujet de « Et maintenant?… »

  1. Klaudandreson

    …. il ne reste plus qu’à croquer des chaises vides, elles ont parfois tellement à dire. J’en connais une, au jardin du Luxembourg, qui s’est lassée des arrière-trains des sénateurs, des fesses des amoureux et du popotin des retraitées. Aujourd’hui, elle n’accueille plus que la fiente des pigeons et un petit panneau trompeur qui parle de peinture fraîche. Elle me sourit parfois, lorsque les feuilles mortes des vieux fruitiers finissent leurs courses sur ses lattes de bois. Je crois qu’elle serait contente qu’un peu de ton encre immortalise sa tranquille dégénérescence et le subtil déséquilibre de ses pates fragiles. Mais les vivants qui boudent ont bien du charme aussi, surtout quand ils sont sensibles aux pas des femmes sur le gravier.

    A quand la suite des vies à la ligne ?

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  2. Klaudandreson


    Midi sonne. De grâce, éloignez-vous, madame.
    Il dort. C’est étonnant comme les pas de femme
    Résonnent au cerveau des pauvres malheureux
    ….

    N’ayant ni votre culture, ni votre mémoire, j’avoue que ce cher google m’a bien aidé à  retrouver « l’espoir luit comme un brin de paille… ». Et oui, il n’y a pas à tortiller, c’est un bon le Polo.

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  3. Soluto

    > Un bon? le meilleur!!! Un géant suivi de miniatures (c’est pas de moi, c’est de Paul Fort et c’est joliment dit par Brassens dans un album d’inédits…) Je suis de parti pris. C’est le premier poète dont j’ai acheté un recueil (Les Fêtes Galantes)… Je connais bien, presque par coeur, tous les textes que Ferré a mis en musique (Et beaucoup d’autres que je connais par bribes…) J’écoutais ça à longueur de journée dans ma mansarde rue JJ Rousseau… Relisez le poème intitulé « L’art Poétique » Tout est dedans…

    De la musique avant toute chose,
    Et pour cela préfère l’Impair
    Plus vague et plus soluble dans l’air,
    Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. Il faut aussi que tu n’ailles point
    Choisir tes mots sans quelque méprise :
    Rien de plus cher que la chanson grise
    Où l’Indécis au Précis se joint. C’est des beaux yeux derrière des voiles,
    C’est le grand jour tremblant de midi,
    C’est, par un ciel d’automne attiédi,
    Le bleu fouillis des claires étoiles ! Car nous voulons la Nuance encor,
    Pas la Couleur, rien que la nuance !
    Oh ! la nuance seule fiance
    Le rêve au rêve et la flûte au cor ! Fuis du plus loin la Pointe assassine,
    L’Esprit cruel et le Rire impur,
    Qui font pleurer les yeux de l’Azur,
    Et tout cet ail de basse cuisine ! Prends l’éloquence et tords-lui son cou !
    Tu feras bien, en train d’énergie,
    De rendre un peu la Rime assagie.
    Si l’on n’y veille, elle ira jusqu’où ? O qui dira les torts de la Rime ?
    Quel enfant sourd ou quel nègre fou
    Nous a forgé ce bijou d’un sou
    Qui sonne creux et faux sous la lime ? De la musique encore et toujours !
    Que ton vers soit la chose envolée
    Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée
    Vers d’autres cieux à d’autres amours. Que ton vers soit la bonne aventure
    Eparse au vent crispé du matin
    Qui va fleurant la menthe et le thym…
    Et tout le reste est littérature.

    P.Verlaine

    « Et tout le reste est littérature… » Comme dirait ma fille: Trop beau!

    Et ci dessous le texte de Paul Fort, que je viens de relire, et qui est sublime…

    http://www.frmusique.ru/texts/b/brassens_georges/enterrementdeverlaine.htm

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