Archives pour la catégorie Scènes de la vie moderne…

Scène de la vie moderne n°25

Comment? ni riche, ni coquette, ni amoureuse? Ce n’est pas tout cela qu’il te faut, hein? Mais lascive, grasse, avec une voix rauque, la chevelure couleur de feu et des chairs rebondissantes. Préfères-tu un corps froid comme la peau des serpents, ou bien de grands yeux noirs, plus sombres que les cavernes mystiques? Regarde-les, mes yeux! Antoine, malgré lui, les regarde. Toutes celles que tu as rencontrées, depuis la fille des carrefours chantant sous sa lanterne jusqu’à la patricienne effeuillant des roses du haut de sa litière, toutes les formes entrevues, toutes les imaginations de ton désir, demande-les! Je ne suis pas une femme, je suis un monde. Mes vêtements n’ont qu’à tomber, et tu découvriras sur ma personne une succession de mystères! Antoine claque des dents. Si tu posais ton doigt sur mon épaule, ce serait comme une traînée de feu dans tes veines. La possession de la moindre place de mon corps t’emplira d’une joie plus véhémente que la conquête d’un empire. Avance tes lèvres! mes baisers ont le goût d’un fruit qui se fondrait dans ton coeur! Ah! comme tu vas te perdre sous mes cheveux, humer ma poitrine, t’ébahir de mes membres, et brûlé par mes prunelles, entre mes bras, dans un tourbillon… Flaubert
La tentation de saint Antoine

Scène de la vie moderne n°24

Quand je me suis réveillé, je n’étais plus le même homme. Mes pensées savonnaient, bavaient l’une sur l’autre, tout était confus, un peu étrange et la journée de la veille n’avait plus vraiment de réalité. Ça m’a rappelé ces années où je prenais des saloperies, où le monde virait à la faveur d’une impression, d’une émotion, d’une angoisse et où plus rien n’était stable, ni les formes, ni les couleurs, ni mon corps qui savait si bien m’inventer mes peines et mes délices…

Scène de la vie moderne n°22

L’air était à bout de souffle et la poussière scintillante, soulevée par leurs pas, resta suspendue. Ils étaient là, délicieusement pris dans la lumière de l’été sans savoir s’ils avançaient ou reculaient. Le sens de l’éternité, par distraction, venait de les investir. Ils étaient délivrés…

Les éditions des Rêveurs m’informent que le livre « Vies à la ligne«  est disponible ici et

Scène de la vie moderne n°21

Allez, on rentre. Tu sais ce qui me ferait plaisir ma jolie Marthe ? Un coup de cidre et des rillettes sur du pain bis… Je te ferai ta tartine, on regardera les photos des enfants, je te raconterai les nouvelles du quartier… Et après on fera ta toilette… Avec la grosse éponge qui mousse… Je te frotterai le dos doucement en te chantant le petit bal perdu. Faudra pas crier hein… Tu choisiras une belle robe, on enfilera les chaussettes qui serrent pas et  je te mettrai ton galet dans ta poche… Comme ça tu pourras le serrer très fort pendant toute la route du retour… Et cette fois l’infirmière ne te le prendra plus. Elle a bien compris va ! On n’arrache pas des mains les cailloux blancs des vieilles femmes qui se perdent… De toute façon, te fais pas de bile… Je t’appellerai tous les deux jours et je reviendrai te chercher samedi prochain… T’en fais pas, ils sont pas près de nous avoir…

Scène de la vie moderne n°19

Encore un mot dear working girl, ce n’est pas le temps qui doit nous commander ! Quand il nous échappe il faut le rappeler à l’ordre ! S’il ne se donne plus, il faut le prendre ! La preuve, vous prenez bien le temps de ne rien faire (je n’imaginais pas que ce genre d’inactivité soit dans vos cordes …) Trouvons-en pour nous, que je me penche un peu sur vous…

Scène de la vie moderne n°18

(suite du n°17)

   —  Alors? Les deux là-bas?…
   — Je les sens petits joueurs, branques et mauvais chasseurs… Le genre de ceux qui jouent la sérénade sur trois cordes grinçantes et qui n’ont rien en magasin...
   —  Et qui n’assurent pas le recul du coup de fusil…
   — Oh ça, t’inquiète! je saurais le gérer pour eux! On peut quand même aller manger deux crêpes à côté d’eux, si tu veux… Je sens que ça te ferait plaisir…
   —  Surtout si elles sont au Nutella…